Depuis plus de dix ans, le directeur médical de la clinique Gynmed de Vienne s’est spécialisé dans les soins et le traitement médical des femmes sujettes à une grossesse non désirée. La terminologie et le langage utilisés dans le débat public ont pour lui une importance extrême car, explique-t-il, «Il ne peut être question de juger ou de condamner les femmes ayant une grossesse non désirée.» La diffusion de cette idée est, en quelque sorte, devenue pour lui une mission.
Se basant sur ses nombreuses années d'expérience, notamment dans des pays où l'avortement est interdit, il conclut: «A chaque interruption de grossesse, je sauve la vie d'une femme." À d'innombrables reprises, il a été témoin des complications graves dont souffraient et même mouraient des femmes, lorsqu’elles n'avaient pas accès à un avortement sûr.
Au sujet de la discussion concernant le commencement de la vie, il explique: «Bien sûr, les ovules et les spermatozoïdes représentent déjà la vie, mais ne constituent pas encore pour autant «une vie.» Aussi, dans le débat public, et surtout dans certains cercles religieux, ces termes sont-ils souvent incorrectement utilisés. Considérés de manière objective, un embryon est un embryon et un enfant est un enfant. De même qu’il ne viendrait à l’esprit de personne d’appeler un enfant un « jeune vieillard », un embryon n'est pas un enfant.»
Né en 1959 dans la ville souabe de Stuttgart, Christian Fiala a étudié la médecine à l'Université d'Innsbruck. Au cours de ses études, il a publié une brochure sur la contraception à compte d’auteur, «car la contraception et l'avortement étaient alors tabous même dans le programme d’une faculté médicale.» Ce n'est qu’au cours de sa formation de médecin généraliste, qu’il a pris la décision de se spécialiser en gynécologie.
En 1995 C. Fiala a travaillé un an en France, où, pour la première fois, il a assisté à un avortement médical et en a appris la pratique. Après avoir terminé son internat, C. Fiala travailla en plusieurs régions du monde: en Thaïlande, en Suède et en Afrique. «Le travail que j’ai effectué en Afrique et en Asie, où l'avortement est interdit, m’a profondément marqué. Là, il est courant que des femmes meurent lamentablement des suites d'un avortement illégal. Les conditions et les conséquences d'un avortement clandestin sont au-delà de l’imaginable et correspondent à ce que l’on désigne souvent comme une « guerre silencieuse menée contre les femmes ».
Christian Fiala donne à présent des conférences partout dans le monde et a publié de nombreux livres sur le sujet. Il a été pendant plusieurs années président de la Fédération internationale des Associés Professionnels de l'Avortement et de la Contraception (FIAPAC) et est membre de diverses autres organisations qui traitent de l'avortement et la contraception. En 2005, il a présenté sa thèse de doctorat au célèbre Hôpital universitaire Karolinska à Stockholm (Cette thèse représente pour les médecins une qualification supplémentaire qui est reconnue comme une preuve que le médecin peut procéder à des études scientifiques. Il peut dès lors porter le titre de Docteur ou Ph.D.). La thèse de C. Fiala s’intitulait "Améliorer l'avortement médical".
Sa dernière réalisation est un musée consacré à la contraception et à l’interruption de grossesse situé à Vienne www.muvs.org, Fiala a créé là un des musées les plus insolites au monde. Dans quatre salles est exposée la manière dont l’humanité est parvenue, à la suite d’une lutte longue et désespérée, à contrôler sa fertilité. Dans des vitrines blanches et roses, reproduisant le style des années soixante-dix, on peut découvrir tout ce qui concerne les tests de grossesse, la contraception et l'avortement: des premiers préservatifs, faits des membranes animales, à la première pilule contraceptive «Enovid», en passant par des stérilets de toutes les formes possibles et imaginables. Sont également exposés des instruments de douche vaginale appelés «irrigateurs» ainsi qu’un bâton de rouge à lèvres censé remplacer la pilule contraceptive. Des aiguilles à tricoter et des rayons de vélos, qui étaient encore utilisés dans les années soixante, en l'absence d'instruments appropriés à l'avortement.
«Je voudrais contribuer à ce que ce qui était considéré, jusqu'à il y a 35 ans d’ici, comme la « normalité », ne se reproduise jamais. Les décès liés à l'avortement ne représentent nullement une catastrophe naturelle, mais la conséquence logique de l'ignorance politique», explique Fiala.
Extrait du mensuel «Datum» publié en août 2006. Le texte original est en allemand et peut être trouvé à l’adresse: datum_06_08.pdf